Le triangle des incompatibilités

Publié le par Laurent

D'après l’économiste Robert Mundell, on ne peut avoir parfaitement en même temps des taux de changes fixes, la libre circulation des capitaux et l'autonomie de la politique monétaire. Mundell résume cette idée par le schéma ci-dessous que l'on appelle : le triangle des incompatibilités.

Dès les années 1870 jusqu'en 1914, l'étalon-or est un régime de changes fixes parfaitement crédible dans le sens où chaque monnaie possède une définition métallique. Par exemple, le franc français vaut 0,29 gramme d'or à cette époque. L'or peut être considéré comme une monnaie mondiale puisqu'elle a un pouvoir libératoire à l'échelle planétaire. C'est la Grande Guerre qui mettra fin à ce système de changes fixes, laissant place à un système de flottement des monnaies. On peut considérer que ce système représente la situation B sur le schéma : un régime de change fixe et une parfaite mobilité des capitaux.

À partir de 1944, le système de Bretton Woods voit le jour. C'est un nouveau système monétaire international basé sur l'existence d'un régime de changes fixes ajustables, conjugué à un contrôle des mouvements internationaux de capitaux. C'est la situation A sur le schéma : un régime de change fixe et une politique monétaire autonome. Dans une intervention télévisée, le 15 août 1971, le président des États-Unis Richard Nixon proclame officiellement la suspension de Bretton Woods, avant de réellement disparaître en 1976.

Le triangle des incompatibilités

Progressivement, les États s'ouvrent aux capitaux. Cette libéralisation oblige les états à faire un choix entre la politique monétaire ou un régime de change fixe. Avoir le choix, c'est renoncer dirait André Gide.

Alors que les États-Unis se dirigent vers l'autonomie de la politique monétaire, de son côté l'Europe, dans un souci d'intégration monétaire, privilègie le régime de change fixe. C'est dans ces conditions qu'est créé le Serpent Monétaire Européen (SME).

L'un des problèmes majeurs est le fait qu'avec ce système, l'Europe a renoncé à une autonomie monétaire. C'est pourquoi, quelques années après le SME, l'Union Européenne se lance dans le projet d'une monnaie unique dont l'objectif sera de pouvoir passer du change fixe à l'autonomie de la politique monétaire.

L'euro est ainsi créé. Cependant, il ne peut s'ajuster correctement à l'ensemble de la région. De plus, la Banque Centrale Européenne, qui a aujourd'hui la possibilité de faire une relance monétaire, ne sait quelle politique effectuer lorsque les intérêts des pays de la zone sont divergents.

Tel est le dilemme européen actuel...

Publié dans Histoire économique

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